De la liberté d'aller et venir en Nouvelle-Calédonie (là où l'eau coule à l'envers et les gens marchent sur la tête)

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Aujourd'hui je me suis vu retirer mon passeport par la mairie de Nouméa pour une durée indéterminée (potentiellement plus d'un mois) le temps qu'on m'en délivre un nouveau. Je voulais juste un changement d'adresse, mais apparemment c'est trop compliqué d'apposer la nouvelle dans la case prévue à cet effet.

La raison invoquée est que trop de personnes « perdent » leur passeport entre le moment où elles en demandent un nouveau et celui où elles vont le retirer. Inutile de dire que je n'ai pas aimé le procédé, d'une part parce que punir tout le monde à cause du comportement de quelques uns est une mauvaise chose(*) mais surtout parce que je trouve insupportable ce genre de décision arbitraire prise par l'administration au mépris des libertés, ici celle d'aller et venir.

Je reproduis ci-dessous mon premier courriel au Haut-Commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.

Monsieur le Haut-Commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie,

le 28 juillet 2011 à la mairie de Nouméa, lors d'une demande de changement d'adresse sur mon passeport, j'ai eu la surprise de me voir retirer celui-ci par l'agent municipal, le temps que le nouveau passeport soit confectionné (potentiellement plus d'un mois selon les délais locaux). L'agent a justifié ce retrait par un ordre de votre part, à cause d'un certain nombre de personnes ayant déclaré la perte de leur ancien passeport avant de retirer le nouveau.

L'agent m'a demandé pour quelle raison je souhaitais conserver mon passeport. Je lui ai indiqué que je pouvais être amené à voyager pour des raisons professionnelles (je suis chef d'entreprise et tous mes clients sont hors de la Nouvelle-Calédonie) mais plus simplement pour pouvoir jouir d'une liberté fondamentale de valeur constitutionnelle : celle d'aller et venir. L'agent a refusé ces arguments et m'a indiqué que je devrais présenter un billet d'avion en mairie pour pouvoir récupérer mon passeport.

Supposons un instant que je doive impérativement quitter le territoire en urgence alors que la mairie est fermée — par exemple l'on m'annonce la mort d'un proche un vendredi après-midi et je dois prendre le premier vol en partance — comment puis-je récupérer mon passeport pour partir dans les 24 heures ? Outre que je trouve inadmissible d'avoir à justifier mon droit à voyager, dans les faits, cette pratique limite ma liberté d'aller et venir.

Je vous prie donc, M. le Haut-Commissaire, de me permettre de récupérer mon passeport ou de bien vouloir m'expliquer pour quelles raisons de sécurité nationale ou d'atteinte à l'ordre public il est nécessaire que j'en sois privé.

Dans l'attente de votre réponse, je vous prie d'agréer, M. le Haut-Commissaire, l'expression de mes respectueuses salutations.

François Nonnenmacher.

Note :
(*) Ça n'a aucune valeur pédagogique. Et au contraire, un ami qui vient de lire ce billet me dit que si c'est comme ça, il fera « comme tout le monde » une déclaration de perte pour conserver son ancien passeport. Vous avez dit contre-productif ?

P.S. [2 août 2011] J'ai rencontré hier une nouvelle personne qui était au courant de la pratique et m'a dit déclarer systématiquement son passeport volé quand elle en a besoin d'un nouveau, précisément pour garder l'ancien et pouvoir voyager sans avoir à s'emmerder avec cette procédure stupide. Preuve de son caractère contre-productif.