Curiosité et doute

Curiosité et doute sont les mamelles de mon discernement.

J'ai écrit ça l'autre jour chez Michel de Guilhermier. Le fait est que curiosité et doute font partie intégrante de mon mode de fonctionnement depuis que j'ai eu la curiosité de douter, et ça fait quelques lustres. Le fait est, également, que les périodes de grandes décisions sont propices à moultes interrogations, qui conduiront à des changements aussi radicaux que le doute qui les a précédées.

Mais le doute, aussi bénéfique soit-il, est difficile, douloureux, il aiguillonne et excite parfois, il taraude et déstabilise souvent, il ne rassure jamais. Imbéciles, mais heureux, sont ceux qui ne se posent jamais de questions.

Est-ce gaspiller son talent que de vouloir explorer de nouveaux terrains plutôt que d'exploiter son expertise ? Je dois cette interrogation à un jeune entrepreneur de la "nethiconomie" (qui tient un petit blog ici et une petite société ), et dont je connais le point de vue à la façon dont il a réagi quand je lui ai dit que j'envisageais avec le même sérieux des pistes aussi radicalement différentes que le conseil et la création d'une marque de fringues vendues en ligne.

Je comprends son point de vue, et c'est particulièrement encourageant de voir que mes compétences professionnelles actuelles intéressent quelques personnes, qu'il s'agisse d'employeurs ou de clients potentiels. Sans vouloir me vanter[1], j'ai extrêmement rarement rencontré dans la décennie passée des personnes qui avaient effectivement embrassé, les mains dans le cambouis, autant de sujets différents touchant à internet, de la stratégie à la plomberie, du design au navigateur client en passant par les serveurs et les tuyaux, au contenu, aux questions juridiques, de communication, de marketing, et j'en passe. Le revers de la médaille est qu'il existe fort peu de managers capables de comprendre ce genre de profil[2]. Compte-tenu de cet état de fait, et à ce stade de ma réflexion, il me semble que, pour partager son expertise, le mouton à cinq pattes que je suis serait plus efficace, plus intéressant et un tantinet plus satisfait en tant qu'indépendant qu'en tant que salarié[3].

De mon point de vue, cependant, la piste précédente relève presque de la facilité, elle succombe donc facilement au doute (est-ce vraiment ce que j'ai envie de faire ?) et à la curiosité de l'explorateur (qu'est-ce que je n'ai pas encore exploré sur ce média ?). Après tout, mon premier talent est celui d'avoir condensé mon BAC + 7 1/2 en une seule compétence : apprendre à apprendre. My dirty little secret c'est d'avoir découvert que ça m'amusait d'explorer de nouveaux territoires, que j'arrivais à voir quelque chose à travers le brouillard et qu'il avait des gens pour payer cette vision. Je l'ai fait pendant sept ans dans le domaine de la stéréolithographie, et ces dix dernières années sur internet. Je suis un cartographe des temps modernes qui a navigué sur terre et sur mer, et qui commence à lever la tête en se demandant ce qu'il peut bien explorer là-haut. Et justement, il y a bien un truc, et pour explorer le e-commerce à fond, il faut bien commencer par vendre quelque chose.

Mais entre les t-shirts et le cul, un doute m'assaille... ;-).

Notes :
1 — Une qualité plus commune chez ceux qui font faire que chez ceux qui font, et qui m'aura certainement fait défaut dans le milieu "corporate".
2 — J'en sais, hélas, quelque chose, la plupart ne voient toujours internet que comme un sous-ensemble de l'informatique (et ceux qui me rangent dans la case "informaticien" sont rangés dans une case qui commence aussi par "i").
3 — Cependant toute proposition, même indécente (la période des soldes est terminée), sera examinée avec soin :-).