Vote électronique : secrets, cafouillages, incompétence et escroqueries

Au courrier des lecteurs, Hoedic me signale que nos amis québécois ont pu tester le mois dernier le progrès du vote électronique, ou plutôt ses cafouillages :

Tout le monde a constaté que le vote électronique n'offrait pas suffisamment de garanties, a commenté M. Lépine, chef du parti Option Capitale. Il n'est même pas possible de procéder à un réel recomptage, car on doit se fier aux données contenues dans les disques durs. Si on laisse les choses comme elles sont, il en va de la confiance des citoyens envers les élections.»

Evidemment, une erreur de 45 000 votes, ça peut vous changer un résultat d'élection et faire sérieusement râler celui qui croyait avoir gagné, avec des mots peu complaisants pour la firme qui a fourni la technologie :

le système électronique et les ordinateurs fournis par la firme PG Élections ont failli à plusieurs endroits et pendant de longues heures durant la journée laissant place à un système de vote improvisé et illégal

A noter que Montréal a utilisé des urnes électroniques, offrant une trace papier (le bulletin de vote est scanné et conservé, permettant un recomptage éventuel), et que la ville de Québec a, elle, utilisé des systèmes ne laissant aucune trace (à l'ère du principe de précaution à tout va, ils ne pourront pas dire qu'on ne les avait pas prévenus).

Toujours sur le même sujet, on apprend que le CEO de Diebold, dont je vous ai déjà longuement parlé, a démissionné lundi à la veille du dépôt par un cabinet d'avocats du Connecticut d'une procédure judiciaire accusant, entre autres charges, les dirigeants de Diebold d'avoir minimisé les problèmes de la technologie de vote électronique lors des dernières élections américaines, d'avoir été incapables d'assurer le contrôle qualité de ses produits, de manquer de vision sur ses méthodes et d'avoir trompé ses actionnaires sur l'état de la société.

La semaine dernière, l'Electronic Frontier Foundation a déposé une plainte en Caroline du nord afin de faire annuler la certification des machines Diebold et de toutes les machines de type boites noires ne permettant pas l'examen de leur code source (à mon humble avis, ils auraient dû viser l'ensemble de leur fonctionnement interne, pas seulement le logiciel). L'EFF souligne que le bureau des élections a tout simplement enfreint la loi de l'état en autorisant des machines sans s'être assuré de leur qualité et de leur sécurité, et sans obliger leur fabricant à déposer le logiciel sous scellés.

Pendant ce temps, en Floride (chez le frère de l'autre), le superviseur des élections du comté de Leon annonce qu'il n'utilisera plus jamais de machines Diebold pour une élection, après que des chercheurs associés avec l'organisation Black Box Voting ont prouvé (PDF) que, contrairement aux affirmations de Diebold, il est possible de truquer les élections en traffiquant la carte mémoire sans que le système ne puisse le détecter.

Les hommes politiques, surtout en France, aiment à gloser sans fin sur la perte de confiance des citoyens envers la politique. Mais force est de constater que peu d'entre eux (où sont ils ?) trouvent à redire quand le secret, l'incompétence, l'appât du gain et la malhonnêteté touchent au plus près à l'un des fondamentaux de la démocratie : le vote. Le scandale du vote électronique n'a pas fini de faire parler de lui.