Les jours fragiles

Samedi dernier au BHV je l'ai aperçu du coin de l'oeil, il était assis derrière une table couverte de livres. Je ne l'avais pas vu depuis sept ans mais je l'ai instantanément reconnu (j'ai une mémoire visuelle), et me suis rappelé de son nom (là c'est un exploit, je n'ai aucune mémoire des noms). Je me suis approché pour lui dire bonjour.

"On se connait," affirme-t-il sans hésitation, "mais je ne me souviens plus d'où." Je me rappelle à son bon souvenir. Je lui dit tout le plaisir que j'ai eu à lire Un garçon d'Italie et surtout En l'absence des hommes et le félicite pour sa reconversion dans l'écriture. Je suis pressé, je dois partir, je lui promets de lire son nouvel opus. Puis un déclic, à peine sorti, j'appelle mon ami qui est toujours dans le BHV et lui demande d'aller quérir un exemplaire dédicacé de Les jours fragiles.

Dédicace Philippe Besson, 23 octobre 2004

J'ai avalé ce livre en deux jours. Décidément, le style de ce garçon me plaît. Il faut que je lise Son frère.

"Mes rencontres ? Coïncidences, croisements, collisions, compagnie. Que ce monde est petit et riche à la fois !" écrivais-je il y a un peu plus d'un an à propos de ma rencontre avec Philippe Besson. Il doit être écrit quelque part que je ne le rencontrerai que par collisions.

Extraits :

Dimanche 24 mai,

Je m'étonne moi-même de tenir ce journal, d'en ressentir la nécessité, mais après tout Vitalie en tenait un, elle aussi, et cela n'étonnait personne. Au fond, on a le goût de l'écriture dans la famille. Il n'y a guère que notre aîné, Frédéric, que cela rebute. Et puis je suis allée aux écoles. Je sais mon grec et mon latin. Et je m'y connais un peu pour tourner les phrases. Pourquoi devrais-je m'interdire cet exercice ? Hein, quel mal y aurait-il ?

[...]

Et s'il s'agissait seulement de ne pas égarer des sentiments, de retenir des fragments, de conserver des souvenirs, de figer des instants ?
D'égrener les jours.

(Petite pensée quasi blasphématoire, aujourd'hui Isabelle Rimbaud aurait ouvert un weblogue !)

Samedi 20 juin,

Je me porte un peu mieux, aujourd'hui. Je recouvre des forces. Si tout craque, si tout cède, nous serons balayés. Il convient donc de résister, et de ne pas désespérer.