L'habitude porterait en elle une blessure mortelle

Devrions-nous faire l'amour comme si c'était la dernière fois, puisque cela peut-être la dernière fois, c'est-à-dire avec l'énergie décuplée par le désespoir et la volonté ardente, jusqu'au-boutiste d'être dans ce bonheur-là de la communion des corps ? Je dis : nous devrions toujours faire l'amour come si c'était la première fois, c'est-à-dire avec la fébrilité et la ferveur de ceux qui n'ont jamais connu ce moment, et la chance insolente des débutants.

Mais comment retrouver l'innocence du commencement, la belle frénésie des toutes premières heures et la virginité perdue ? Comment ignorer les gestes qu'on connaît désormais, le corps de l'autre qu'on a appris peu à peu ? Je dis : il faut se trouver dans la disposition à être surpris, désemparé, émerveillé, et puis être capable d'étonner l'autre, encore. C'est quelque chose qui est possible, qui est nécessaire. L'habitude porterait en elle une blessure mortelle.

Extrait de En l'absence des hommes de Philippe Besson qui révèle de certaines vérités leur douloureuse beauté.