L'Académie l'a tuer

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Ce qui suit va me faire gagner des points dans la catégorie adulte/chiant, mais on ne se refait pas.

Dans l'écriture, j'aime jouer sur le registre du style, mais pas avec l'orthographe. Je crois que j'ai secrètement voulu être le seul informaticien de ma famille (et peut-être d'une ou deux générations d'après ce que je vois au bureau) à être capable d'aligner une phrase de plus de trois mots sans faire de faute de français. Des fautes, bien sûr, j'en fais régulièrement, mais chaque fois que possible je me relis, je prends un dictionnaire, je corrige. Parfois, je pousse le vice jusqu'à ouvrir mon livre de conjugaison voire le Pièges et difficultés de la langue française de Jean Girodet (petit format, bien pratique). J'ai horreur de laisser passer des fautes dans un document et je me mords souvent les doigts dans la seconde qui suit l'envoi sur un weblogue d'un commentaire mal relu qui contient une faute grosse comme une faille de sécurité Microsoft.

Plus jeune, j'avais également horreur de lire la prose erratique de mes congénères mal comprenants. Je me suis soigné en vieillissant, partant du principe que je ne pouvais contrôler que ma propre écriture, que l'erreur est humaine et qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse . Encore que pour certains, j'ai des doutes (sur le flacon, pas sur leur ivresse). La preuve, j'arrive maintenant à lire Karl sans bouger les oreilles alors qu'on sent encore que sa transformation de vache Normande à créature polymorphe Montréalaise a laissé des traces ("c'est pas des fautes d'orthographe, c'est mes sabots qui ripent sur le clavier").

Voilà pourquoi, quand je suis tombé sur ce billet chez hoedic pour découvrir que nos immortels s'amusent à rectifier l'orthographe derrière notre dos (alors qu'ils n'en sont encore qu'à la lettre M de leur dictionnaire, les coquins), le ciel m'est tombé sur la tête. Mon dictionnaire, mon brave petit Robert de 1972 de la société du nouveau Littré dont l'un des rédacteurs n'est autre qu'Alain Rey, est obsolète.

Je traîne ce dictionnaire depuis que je sais chercher un mot par ordre alphabétique. Il est usé jusqu'à la corde.

L'Académie l'a tuer.

Si c'est comme ça, zutre, ta mère en short devant le 23, quai de Conti !

Je ne vais plus pouvoir continuer à terroriser mes collègues du marketing avec mon fameux "tu fais de l'événementiel depuis cinq ans et tu ne sais toujours pas écrire événement ?". Encore que pour certains, je doute qu'ils aient jamais croisé un dictionnaire depuis 1972, alors les modifications de l'Académie...

Maintenant il est temps d'aller se coucher, sachant que je vais me retourner dans le lit pendant deux heures en me demandant si j'ai laissé passer une faute dans ce billet :)